Présentons les faits: All Cannibals c'est donc la continuité de feu-Macadam Club avec un guitariste en moins et beaucoup d'idées en plus. Trois garçons dans le vent et un producteur Bordelais recueillis par l'ex milieu du Werder: Johan Micoud (si ça c'est pas la classe) qui a monté son label Virage Tracks. Un pont entre la Normandie et la Gironde comme en echo au pont entre l'Angleterre et l'ouest ricain qu'évoque ce premier album.
Parce que oui, on navigue pas mal entre la manche et l'atlantique avec ce requin noir. Entre les guitares cabossée à la Libertines et les mélodies empruntées tantôt aux Walkmen, tantôt aux fantômes de Pavement. Ce mélange permanent qui force l'oreille curieuse à changer de direction à chaque coup de cymbale donne un 12 titres pour le moins étonnant et même un peu irritant.
Oui irritant parce que cet album est plein de défauts. Mais la où le trio est brillant c'est que chacun d'eux est une qualité qui se planque. D'abord l'accent imparfait d'Emmanuel peut aisément agacer par moment, mais les mélodies qui le portent bottent magistralement le cul des erreurs linguistiques; comme sur l'euphorisante Friendly Youg Cannibals qui donne envie de chanter tout nu dans un près (ça me regarde). On pourrait aussi leur reprocher une production parfois un peu crado. Sauf qu'à l'écoute des 12 morceaux c'est surtout un parti pris très frais qui ressort de ces expérimentations joueuses à base de claviers débilos et de faux scratches sur-mixés.
J'en parlais déjà plus haut, mais le groupe peut aussi être facilement qualifié de Libertines-like. C'est une connerie que j'ai été le premier à faire. Mais si l'on creuse un peu des Lib's ne reste que le meilleur, à savoir le côté punk sans le trash bidon, la naïveté d'un Ha Ha Wall retrouvée dans les rythmiques aussi speedées que hachées à la machette. Et puis plutôt que Doherty et Barât on entends finalement beaucoup plus de Kinks, de Pavement, un peu de Jarvis dans l'écriture...
Et toutes ces belles références se ressentent dans le talent qu'à le groupe à emmener un morceau là où il le souhaite, à ne pas perdre en simplicité dans la richesse de production et plus simplement à écrire des chansons. Parce que mine de rien c'est plutôt rare les groupes qui écrivent encore des chansons plus que des morceaux. Quand on écoute (encore et encore) The Choir, on se dit que ces trois là sont de cette race presque éteinte et le disque peut être aussi pété de défauts qu'il veut, il tient l'essentiel.